C’est parti pour une séance effeuillage!
Peut-on trouver un titre qui soit plus putaclic que ça? Je ne crois pas. En plus, vous risquez d’être déçus. Non, Angy - ou même Thomas - ne va pas se déshabiller pour le plaisir de votre imagination. Vous l’aurez donc compris, on parle toujours du bus. Et avant de dévoiler les plus profonds soubassements de son être, et pénétrer ainsi dans son intimité, sans consentement en plus (c’est vraiment inadmissible), on se doit au moins de finir les présentations. Oui, parce que voyez-vous, le nouveau membre de la famille a désormais un nom. Parce que c’est une vraie cure de jouvence que nous lui avons proposée avec cet achat, une sorte de deuxième jeunesse, de renaissance. Un cadeau que ce quarantenaire en devenir n’a pas pu refuser. Toujours est-il qu’on se devait de mettre son état civil à jour. Et c’est chose faite! Il se prépare à refaire surface sous un nouveau blaze. Même si ça ne sera officiel que quand sa transformation sera terminée, on voulait vous mettre dans la confidence. On vous présente donc Marcel, Marcel Skoolie!
Marcel nous a rejoint sur Mill Valley. Jusqu’ici, il avait opéré dans le nord de la Californie, au sud de Redding, où il transportait les enfants de l’école primaire de la Cascade Union Elementary School. Après un passage éclair à Sacramento, entre les mains de ce cher Donnie, le voilà qui fait ses premiers pas dans la baie de San Francisco. Lui, le grand gaillard de la campagne, devient temporairement citadin forcé. Il le dit lui-même, il ne se sent pas à l’aise dans les environs. Il a besoin de grands espaces. Et puis, il faut dire qu’il est posé au bord d’une petite route. On s’est dit qu’on n’allait pas l’y laisser plus de quelques jours. Les gens du quartier sont cordiaux au premier abord, mais les événements inhabituels sont rarement bien accueillis. Il n’est pas rare de voir le shérif débarquer. On peut d’ailleurs raisonnablement se dire que sa présence a déjà été signalée aux autorités. Neighborhood watch oblige! Il nous faut, de toute façon, trouver un endroit approprié au chantier de conversion, où nous allons pouvoir sortir les outils, nous étaler, et faire du bruit, sans déranger.
C’est dans les marais de Novato, à 20 minutes d’ici, que nous lui avons trouvé un nouveau domicile. Le lieu est tenu par Trevor, un jeune propriétaire qui a hérité d’un terrain légué par son père décédé récemment, et qui veut en faire un business de stockage de bateau et camping-cars, ou Recreational Vehicles, RV comme on dit aux USA. Il va être bien là-bas. Déjà, il va pouvoir se familiariser avec sa famille d’adoption, les camping-cars. Il n’a pas encore les codes, ni les parements, mais on sent chez lui une vraie volonté d’intégration. On est optimiste. Et puis, ici, on a tout l’espace nécessaire. Alors que le chantier commence!
C’est parti pour la première étape. Et ça part sur un striptease forcé. Mais où est-on, me direz-vous?! Je comprends votre interrogation, mais je vous rassure tout de suite. S’il pouvait parler, Marcel vous dirait certainement que ça faisait bien trop longtemps qu’on ne lui avait pas huilé la carcasse et chatouillé les boulons. Après bientôt quarante ans, il est un peu grippé. Ce genre d’attention est donc la bienvenue. En plus de ça, c’est quelques centaines de kilos qu’on va l’aider à perdre. Ça veut dire moins d’effort à fournir sur la route. Bon, on ne lui a pas encore expliqué combien nous allions en rajouter par la suite. On attend le bon moment.
C’est par les sièges qu’on commence. Ça nous semble assez facile. Il faut être deux pour chaque boulon, une personne à l’intérieur pour tourner la tête du boulon, et une, dehors, sous le bus pour maintenir l’écrou. On démarre à deux sur la même tâche, c’est sympa! Imaginez-vous combien nous sommes excités par ces premiers pas! Il y a quelques jours, nous passions nos journées derrière nos ordinateurs, et nous voici désormais littéralement le cul dans la boue, heureux. C’est fou la vie comme tout peut changer en un instant, et comment le bonheur n’est pas systématiquement synonyme de confort…
On avance vite, après la première journée, tous les sièges sont retirés. Malheureusement, il n’y a rien à en faire. Direction la déchetterie! Le lendemain, on s’attaque au sol. Un vrai moment de plaisir. Le sol est composé de panneaux de contreplaqué, directement vissés dans le métal, et recouverts d’une couche de caoutchouc collée par-dessus. Qui a déjà identifié le challenge? Je vous explique. Les vis étant cachées sous le caoutchouc, il est impossible de savoir où elles se trouvent. On va donc devoir s’employer à arracher les panneaux de contreplaqué au pied de biche. Ce n’est pas ainsi que nous avions imaginé cette tâche. Il faut dire les choses comme elles sont, on en a chié. Si je connaissais l’idiot (qui a fait sauter le pont - pour ceux qui auront la référence) qui a décidé de coller le revêtement par dessus les vis. Toujours est-il que nous en sommes enfin venu à bout. Mais quel enfer! Le constructeur du bus n’avait vraiment pas prévu que ce sol soit un jour retiré.
Première erreur! Nous voulions retirer le chauffage intérieur, originellement situé sous une banquette. Pour ce faire, quelques boulons à dévisser et deux tuyaux à retirer, partant vers le moteur (un indice?). Nous pensions bêtement que de l’air circulait dans ces tuyaux. Nous avons donc commencé à scier le premier à proximité du chauffage. Très vite, à la vue d’un liquide jaunâtre, nous avons réalisé notre erreur. Pas d’air là-dedans, plutôt du liquide de refroidissement. Youhou! Direction Home Depot (l’équivalent américain de Leroy Merlin) à 15 minutes de là pour acheter de quoi refermer le circuit après avoir enlevé le chauffage. C’est en forgeant qu’on devient forgeron disaient-ils? Je crois qu’on est loin d’avoir fini de forger si vous voyez ce que je veux dire.
Jusque-là, le résultat de chaque jour de travail est très visuel, c’est encourageant. On doit désormais retirer les panneaux métalliques qui composent le plafond et les murs intérieurs. On va refaire toute l’isolation du bus. Commençons par un calcul rapide. Il y a douze panneaux au plafond. Chacun des panneaux compte 65 vis, soit 780 vis au total. Rien que ça. Le tout, les bras levés, vous voyez le problème? Ça sent la bonne séance de musculation. Allez, on y va! Après seulement quelques vis retirées, c’est la cata. Certaines vis sont grippées... Normal après tant d’années, me direz-vous! Première vraie galère. Ça prend une plombe à retirer, même avec un extracteur. Mais on ne baisse pas les bras (au sens figuré comme au sens propre), on continue. Et peu à peu, on en voit le bout. Inutile de vous dire combien nous sommes soulagés une fois que tout est déposé. On a mal aux bras quand même.
Voilà comment, après deux semaines de chantier, nous avons fini la mise à nue intérieure du bus. Et c’est rien de dire que c’est déjà le bordel sur le chantier. On en met partout. Rien n’est organisé. Va falloir faire un peu de rangement pour ne pas faire tâche sur le terrain devant le propriétaire. Les vacances de noël approchent, et nous rentrons dans quelques jours en France pour deux semaines. Nous sommes tellement contents de ce début d’aventure. Déjà plein de choses à partager avec les amis et la famille. Reprise du chantier dans quinze jours!